Erdogan Pacha ou la fin d’une république
Nous
n’avons cessé d’attirer, dès le début de la guerre contre la Syrie,
l’attention de nos lecteurs sur les intrigues du Parti pour la justice
et le développement (AKP) incarné par Erdogan Pacha à rétablir le
califat ottoman sur les cendres des villes syriennes. Nous avons suivi
les chemins détournés par lesquels monsieur Erdogan cherche à s’emparer
des bains de sang en Syrie. Nous avons indiqué en même temps comment les
ambitions califales d’Erdogan Pacha sur le plan de la politique
étrangère – rétablir le califat ottoman dans les anciennes provinces
arabes de l’Empire ottoman – entraînent des mesures aussi « califales »
sur le plan de la politique intérieure.
Quelques
faits prouvent de façon frappante à quel point les libertés civiles en
Turquie souffrent des politiques du Parti pour la justice et le
développement, maintenant confondu avec le personnage de monsieur
Erdogan.
Fin d’une république
Or, quelles sont les mesures que monsieur Erdogan et son parti politique, le Parti de la justice et du développement (AKP), prennent pour contrecarrer la république ? Et dans quel but ?
La décision de ce
dernier à construire un centre commercial au parc de Gezi avait soulevé
une tempête de manifestations, dans les villes turques, et de critiques,
de la part des partis de l’opposition. Berfu Kiziltan, collaborateur du
quotidien turc Hurriyet, s’opposa aux rhétoriques sourdes de monsieur
Erdogan, et lui demanda de s’excuser auprès du peuple turc. Serkan
Demirtas donna l’alarme de la fin de la république en Turquie. Son
article publié dans Hurriyet démontre comment la Turquie est devenue un
pays où le parti au pouvoir exerce la force d’État policier dans sa
forme la plus brutale. Le leader du Parti du Peuple (CHP), Kemal
Kılıçdarol, avait fustigé, plusieurs mois auparavant, monsieur Erdogan
en disant que le premier ministre avait l’intention d’opprimer les gens
et de restreindre la démocratie.
Mais
cela ne suffit pas à monsieur Erdogan. Une des premières démarches
qu’il a entamées est une démarche de restriction des libertés civiles et
de réduction de la vie démocratique, démarche contre la démocratie et
la laïcité, contre les fondements de la république, voire la Turquie
moderne kémaliste.
Erdogan doit s’excuser
Dans
un article intitulé « Liste de besoins d’Erdogan : tolérance, compromis
et excuse [1]», publié dans le quotidien turc, Hurriyet, Berfu Kiziltan
s’oppose aux rhétoriques sourdes du premier ministre Recep Tayyip
Erdogan, et lui demande de s’excuser auprès du peuple turc. Kiziltan
montre que les forces démocratiques et la société civile se sont
descendues dans les rues pour protéger la démocratie et la république,
pour protester contre la réduction de la liberté de la presse et de
l’expression, pour faire face aux arrestations arbitraires de dizaines
de journalistes libres, mais aussi pour exprimer leur mécontentement
envers les mesures antidémocratiques du gouvernement Erdogan, telles que
la censure d’Internet, la criminalisation de l’avortement, la
croissance des actes de violence contre les femmes, le mépris des arts
et de la culture, et récemment les restrictions sur la consommation
d’alcool. En un mot, les Turcs protestaient contre l’insistance du
gouvernement Erdogan à contrôler chaque aspect de leur vie quotidienne,
voire à assassiner la république.
Berfu
Kiziltan critique l’argument du premier ministre concernant les
résultats des votes en indiquant que les cinquante pour cent des votes
ne veulent pas dire que le premier ministre, Erdogan, est libre à
négliger l’autre moitié du peuple turc ni à la dénigrer [2]. Pour
rappel, les autorités turques ont désigné les manifestants des vandales,
des marginaux, des séparatistes, des provocateurs, des alcooliques et
finalement des çapulcu [3] ; or ceux-ci sont en réalité plus éduqués et
plus formés que les “hâbleurs” du gouvernement. Kiziltan montre comment
les manifestants avaient réussi à créer, à la place Taksim et au parc de
Gezi, un environnement remarquable d’unité, malgré le discours de
division et de polarisation de monsieur Erdogan. À preuve, des
activistes avaient pu créer un marché, une clinique et une bibliothèque
et avaient utilisé l’humour comme l’arme la plus efficace contre
l’oppression des autorités. Les jeunes manifestants avaient créé le
rire, et avaient trouvé de nouveaux moyens pour développer la lutte. Ils
avaient appris d’une façon remarquable à survivre l’atrocité de la
matraque policière. La plupart d’eux avaient été sauvagement battus par
les policiers qui tiraient des centaines de bombes lacrymogènes.
Pourtant, les manifestants avaient résisté sur la place Taksim et
partout dans les villes turques. Tout cela a poussé Kiziltan à demander
au premier ministre Erdogan de s’excuser aux manifestants, car selon
elle gouverner n’est pas terrifier le peuple. Pour elle, un vrai
gouverneur c’est celui qui gagne le respect des citoyens, non leur peur :
« La moitié du peuple attend à ce que le premier ministre s’excuse
sincèrement avant qu’on lui redonne sa légitimité ; car parfois, il vaut
mieux faire un pas en arrière, mais dans la bonne direction que d’en
faire un en avant, mais dans la mauvaise direction [4] », indiqua
Kiziltan.
Erdogan et l’État policier
Pour
sa part, Serkan Demirtas donne l’alarme de la fin de la République en
Turquie. Son article publié dans Hurriyet et intitulé « Bienvenu à la
République turque d’État policier [5]» démontre comment la Turquie est
devenue un pays où le parti au pouvoir exerce la force d’État policier
(même militaire si nécessaire), dans sa forme la plus brutale, contre
l’autre moitié des électeurs qui ont déclenché une révolte massive, pour
freiner les penchants autoritaires croissants de monsieur le premier
ministre :
Turkey has become a
country where the ruling party representing half of the country’s
electorate is exercising the state’s police (and military if needed)
force in the most brutal way on the other half of electorate, who
launched a massive uprising against the government’s growing
authoritarian inclinations [6].
Derrière
les pratiques antidémocratiques du gouvernement turc se trouve la
rhétorique « nous et eux » de monsieur Erdogan ; ces pratiques-ci
discriminent contre les personnes qui ne suivent pas un mode de vie
conservateur digne pour ainsi dire à un musulman pieux.
At
the core of this behavior lies the “us and them” policy/rhetoric of
Prime Minister Recep Tayyip Erdoan, whose purpose is to discriminate
against those who do not share the conservative lifestyle of a pious
Muslim and create a sort of “neighborhood pressure” on them. But this
oppression is not limited to the scope of the secular-conservative
debate in Turkey as the trend of this behavior is to expand its
influence on different segments of the society through intimidation [7].
En
réalité, la Turquie se dirige vers un régime d’État policier. Il suffit
de considérer la brutalité utilisée par les policiers contre les
manifestants à Taksim et au Gezi. À titre d’exemple, après deux mois au
commencement du mouvement Taksim, les Turcs se sont descendus le 2 août à
la place Taksim pour protester contre la violence de la police envers
les jeunes. Il s’agit ici d’un jeune garçon de 14 ans, Berkin Elvan, qui
avait été battu sauvagement par des policiers, le 15 juin, alors qu’il
était sorti de la maison de ses parents pour acheter du pain ; Berkin
Elvan lutte toujours contre la mort aux soins intensifs [8].
Selon
Elvan, la raison pour laquelle les Turcs avaient protesté dans les rues
n’était pas seulement la construction d’un centre commercial dans le
parc de Gezi, mais bien le rejet des politiques du gouvernement Erdogan
qui visent à réduire la vie démocratique et à limiter les libertés
publiques, comme première étape vers l’établissement d’un régime
islamique califal. Autrement dit, la société civile, les forces
démocratiques et les partis politiques laïcs étaient partis d’une
conviction tout à fait justifiée selon laquelle les dangers qui
menaçaient – et menacent encore – la Turquie étaient les politiques
antidémocratiques de monsieur Erdogan. De même, une partie de la société
turque s’est rendu compte du conflit actuel qui se déroule entre ceux
qui tendent à préserver les piliers de la République moderne, reposant
sur la légitimité populaire, la citoyenneté, l’alternance du pouvoir, la
justice sociale et la dignité humaine, d’un côté, et ceux qui tendent
d’abord à contrecarrer la République, puis à la bouleverser, pour
établir ensuite, sur ses cendres, un régime califal fondé sur la
doctrine des Frères musulmans ; un régime sous lequel les forces laïques
et démocratiques seraient enfin anéanties, et les minorités ethniques
et religieuses, telles que les chrétiens, les alévis, les juifs, les
Kurdes et les Arméniens, perdraient leurs droits de citoyens de la
République turque pour en devenir des sujets du nouveau califat turc.
Quelques
mois avant le déclenchement des manifestations dans le parc de Gezi, le
leader du Parti du Peuple (CHP), Kemal Kılıçdarol, avait fustigé le
premier ministre Erdogan en disant que le premier ministre avait
l’intention d’opprimer les gens et de restreindre la démocratie : « Si
un premier ministre se plaint de la séparation des pouvoirs, ce qui
signifie se plaindre de la démocratie, il ne peut servir de premier
ministre. Cela signifie que sa vie politique est terminée en matière de
démocratie. Il ne peut pas parler de démocratie et de liberté. Il ne
peut pas être perçu comme le premier ministre d’un pays moderne. Il est
un premier ministre qui a l’intention d’établir son sultanat, pour
opprimer son peuple et restreindre la démocratie », avait déclaré
Kılıçdarolu lors d’une conférence de presse le 19 décembre 2012 [9].
En
réalité, la légitimité populaire, la citoyenneté, l’alternance du
pouvoir, la justice sociale, la liberté de la presse, la liberté
d’expression, la vie privée et la dignité humaine, telles sont les
piliers de la société moderne en Turquie qui sont en passe d’être
détruits au profit d’une idéologie religieuse caressée par le rêve
califal qui fait partie des vestiges des siècles passés. Une idéologie
qui fait tout pour saper l’édifice républicain moderne et qui aurait
pour mot d’ordre la tyrannie, non seulement en Turquie, mais aussi en
Égypte, en Tunisie, en Libye, et partout dans le monde musulman où les
Frères musulmans et leurs « coreligionnaires » salafistes pourraient
réussir un jour à prendre le pouvoir – que le bon Dieu nous épargne
d’une telle catastrophe !Or, quelles sont les mesures que monsieur Erdogan et son parti politique, le Parti de la justice et du développement (AKP), prennent pour contrecarrer la république ? Et dans quel but ?
Premièrement, sur
le plan de la liberté de la presse et de l’expression, il n’est que de
constater le dernier classement de la Turquie sur l’échelle de la
liberté de la presse, tel que présenté dans le rapport de l’organisation
« Reporters Without Borders » (RWB), pour savoir le degré des menaces
contre la république et la démocratie dans ce pays. Pour preuve,
l’organisation RWB a indiqué que la Turquie est devenue actuellement la
plus grande prison pour les journalistes [10], occupant la position 154
parmi les pays du monde en matière de la liberté de la presse, soit un
recul de six positions du rapport de 2012 [11]. En plus, le rapport de
ladite organisation critique la paranoïa des autorités turques qui
assimilent toute accusation contre elles à un complot tramé par un
groupe d’organisations illégales. En plus sur le même plan, l’Union
européenne a critiqué les autorités turques de museler les libertés de
l’expression, en réponse à la destitution du journaliste Yafuz Bidar
[12] du journal turc Sabah. La commission européenne a insisté dans un
communiqué sur l’importance de certaines questions liées à la liberté de
l’expression, soulignant que « l’indépendance de la politique
éditoriale, la transparence et le refus de toute ingérence politique
sont les piliers essentiels qui assurent la liberté des médias ». Ladite
commission s’est dite « inquiète quant aux mesures prises envers
certains journalistes turcs, telles que les destitutions et les
sanctions pénales » [13].
Deuxièmement,
sur le plan des droits de l’homme, la Cour européenne des droits de
l’homme (CEDH) a rendu, en mois de juillet, plusieurs arrêts concernant
des cas de violations des droits de l’homme en Turquie ; nous en
mentionnons l’arrêt du 16 juillet en l’affaire Abdullah Yasa et autres
c. Turquie, sur lequel la CEDH a dit, à l’unanimité, qu’il y a eu «
violation de l’article 3 (interdiction de la torture et des traitements
inhumains et dégradants) de la Convention européenne des droits de
l’homme [14] ».
Troisièmement,
sur le plan de la citoyenneté, le quotidien turc, Hurriyet, un document
officiel écrit par la direction de l’Éducation provinciale d’Istanbul a
révélé que les minorités ethniques et religieuses d’origines juive,
grecque, anatolienne et arménienne sont classifiées par l’administration
de la population de la Turquie selon un « code de race » secret, entré
en vigueur en 1923, l’an de la fondation de la République turque. Par
conséquent, les citoyens turcs d’origine grecque sont identifiés par le
code 1, ceux d’origine arménienne par le code 2, et ceux d’origine juive
par le code 3, a indiqué le quotidien Hurriyet [15]. Altan Tan, un
député du Parti pour la paix et la démocratie, a déclaré que de
pareilles allégations se trouvent depuis longtemps, mais elles étaient
toujours rejetées par les autorités. Tan a ajouté qu’une « telle
pratique, si elle existe vraiment, est une grande catastrophe. Les
autorités classifient secrètement et illégalement les citoyens selon un
profilage racial et religieux. C’est une grande catastrophe »[16].
Quatrièmement,
sur le plan de la justice sociale, la Prof. Yasemin Nceolu, lectrice à
l’Université Galatasaray à Istanbul, a donné l’alarme sur la croissance
des discours de haine et de discrimination dans les médias turcs. Nceolu
parlait dans un panel de discussion organisé par l’Association des
journalistes turcs à Istanbul[17]. Selon elle, les médias font recours à
une idéologie, devenue dominante dans le discours quotidien, qui se
base sur une rethorique de «nous et eux» ; ceux qui ne répondent pas à
la description du « nous » sont considérés comme “autres”. Nceolu ajoute
que dans le discours quotidien des médias, « on trouve aussi
l’homophobie, l’antisémitisme, l’anti-alévisme, ainsi qu’une certaine
opposition aux non-musulmans [18] » (TDA). Pour sa part, l’avocat Nazan
Morolu, qui participait au panel de discussion, a déclaré au quotidien
Hurriyet que la discrimination contre les femmes avait augmenté en
Turquie pendant les dernières années. Il a indiqué que « les femmes qui
étaient arrêtées pendant les manifestations du parc de Gezi ont été
harcelées et elles n’ont pu rien dire [19] ». Il a ajouté qu’auparavant «
nous pouvions parler de tels sujets à la télévision, il y a quelques
années, mais maintenant nous ne pouvons plus, toutes les chaînes
télévisées sont bloquées, nous ne pouvons pas faire entendre notre voix
[20] ».
Cinquièmement, sur le
plan de la vie privée et de la dignité humaine, le président turc
Abdullah Gül avait promulgué une loi controversée voulue par le
gouvernement Erdogan qui restreint la consommation, la vente et la
publicité des boissons alcoolisées, en dépit des manifestations qui
secouaient le pays. La vente de boissons alcoolisées est désormais
interdite entre 22 heures et 6 heures. Voté le 24 mai au terme d’une
procédure d’une rare célérité, le texte a été violemment dénoncé par
l’opposition laïque qui l’a déclaré un texte liberticide. Tout au long
des débats parlementaires, l’opposition laïque a violemment dénoncé un
texte liberticide, prêtant au régime la volonté de vouloir régir les
comportements privés de la population et d’islamiser la société turque.
Ce tour de vis a été jugé inquiétant par les laïcs qui voyaient dans
cette décision une preuve de l’islamisation de la politique du Parti de
la justice et du développement (AKP), au pouvoir depuis plus de dix ans
[21].
Selon plusieurs partis
de l’opposition, les mesures de monsieur Erdogan constituent une attaque
contre la base même de la démocratie et de la république en Turquie.
Fida Dakroub, Ph.D
Notes
[1]Kiziltan, Berfu. (18 juin, 2013). “Erdoan’s needs list: Tolerance, compromise and apology”. In : Hurriyet. Récupéré le 18 juin 2013.
[2] loc. cit.
[3]
Çapulcu est un substantif turc signifiant, vandale, canaille, racaille
ou encore vermine. Cette qualification est utilisée notamment par le
premier ministre turc Recep Tayyip Erdoan pour désigner les personnes
prenant part au mouvement de protestation en Turquie de 2013. Le
qualificatif est par la suite utilisé par les manifestants et les
sympathisants eux-mêmes qui se définissent comme çapulcu, et l’adaptent
notamment en anglais chapuller ou chapulling, ou en français chapulleur.
[4] Kiziltan, op.cit.
[5] Demirtas, Serkan. (18 juin 2013). “Welcome to the Turkish Republic of Police State”. In : Hurriyet. Récupéré le 18 juin 2013.
[6] loc. cit.
[7] loc. cit.
[8] Russia Today. (2 août 2013). “Istanbul police use tear gas to break up protest over critically injured teenager”. Récupéré le 5 août 2013.
[9] Birand, Semih. (20 décembre 2012). «Fin de la « démocratie » en Turquie: Erdogan veut éteindre la séparation des pouvoirs…». In : JSS News. Récupéré le 20 août 2013.
[10] Hurriyet. (24 juillet 2013). “Turkey now 154th in world press freedom index”. Récupéré le 31 juillet 2013
[11] Reporters Without Borders. (sans date). “Press Freedom Index 2013″. Récupéré le 3 août 2013.
[12]
Yafuz Bidar, journaliste turc de renommée, avait reçu une invitation de
la commission européenne pour prononcer un mot dans un congrès tenu fin
juin dernier à Bruxelles. Il avait alors critiqué le gouvernement turc
et les grands hommes d’affaires qui s’ingèrent politiquement dans les
affaires du journalisme.
[13] Suzan Fraser. (26 juillet 2013). “Turkey Criticized After Journalist Yavuz Baydar Fired For New York Times Op-Ed”. In : The Huffington Post. Récupéré le 31 juillet 2013.
[14] Cour européenne des droits de l’homme. (16 juillet 2013). Requête no 44827/08, « Affaire Abdullah Yasa et autres c. Turquie ». Récupéré le 31 juillet 2013.
[15] Hurriyet. (1 août 2013). “Minorities in Turkey tagged by ‘race codes,’ official document reveals”. Récupéré le 2 août 2013.
[16] loc. cit.
[17] Hurriyet. (30 juillet 2013). “Turkish journalists discuss hate speech in media”. Récupéré le 5 août 2013.
[18] loc. cit.
[19] loc. cit.
[20] loc. cit.
[21] Oberti, Charlotte. (27 mai 2013). « La Turquie poursuit sa croisade contre l’alcool ». In : France 24. Récupéré le 18 août 2013.
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