ΤΡΊΤΗ, 22 ΝΟΕΜΒΡΊΟΥ 2011
Danielle Mitterrand, la mère des Kurdes, s'est éteinte
Le Monde 22 novembre 2011. Lundi dernier, je monte dans un taxi à Diyarbakir, la grande ville kurde de l'est de la Turquie. Le chauffeur est un vieux hadji aux manières polies, les cheveux blancs, le costume élimé. Il a largement passé l'âge de la retraite. Une fois connue ma destination et ma nationalité, française, il se tourne vers moi, le regard humide. "La France... Madame Mitterrand! Je n'oublierai jamais. C'est notre mère" dit ce vieil homme.
Les anciens, dans tout le Kurdistan se souviennent toujours avec émotion de l'ex première dame française et de son action humanitaire en faveur des Kurdes a la fin des années 80. En 1986, elle s'engage en faveur de la libération de Mehdi Zana, le maire de Diyarbakir, condamné à 14 ans de prison par la justice militaire turque pour un discours en langue kurde. Sa femme, Leyla Zana, sera elle-même emprisonnée quelques années plus tard pour des motifs similaires.
Ensuite c'est le régime baasiste de Saddam Hussein qui s'acharne contre la population kurde d'Irak, dans le Nord. Les massacres de Halabja, en 1988, furent le point culminant de cette répression, chassant des centaines de milliers de Kurdes sur les routes. Avec Bernard Kouchner, Danielle Mitterrand réclame alors l'application du droit d'ingérence. Avec France Libertés, elle n'a jamais cessé de témoigner de son engagement pour la cause kurde. Pour ses 25 ans, en mai dernier, la Fondation avait publié une rétrospective de ses actions au Kurdistan.
En 1997, c'est dans son bureau à Paris, que les deux chefs tribaux kurdes, Massoud Barzani et Jalal Talabani se réconcilient, après 5 ans de guerre fratricide.
En 2009, elle s'était rendue pour la dernière fois à Erbil, capitale du Kurdistan irakien, pour y ouvrir une nouvelle école française qui porte désormais son nom.
"La mère des Kurdes" telle qu'on la surnommait souvent s'est éteinte mardi matin a Paris, a l'âge de 87 ans. Nul doute qu'à Erbil, ou à Diyarbakir, les Kurdes lui rendront un vibrant hommage.
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C’était Danielle Mitterrand
Le Nouvel Observateur
ROBERT SCHNEIDER, JOURNALISTE POLITIQUE AU "NOUVEL OBSERVATEUR", A CÔTOYÉ PENDANT DES ANNÉES LE COUPLE MITTERRAND. IL SE SOUVIENT DE LA PREMIÈRE DAME, DISPARUE À L'ÂGE DE 87 ANS.
LE 14 OCTOBRE 1994, TROIS MOIS APRÈS SA SECONDE OPÉRATION. FRANÇOIS MITTERRAND, TRÈS AFFAIBLI, M’INVITE À DÉJEUNER EN TÊTE À TÊTE À L’ELYSÉE. DANIELLE NOUS REJOINT AU CAFÉ. EN SOURIANT, IL ME DIT : "VOUS AVEZ DE LA CHANCE, VOTRE FEMME EST FRANÇAISE ! LA FEMME DU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE, ELLE, EST KURDE ! ELLE M’A FAIT RENCONTRER RÉCEMMENT L’UN DE SES PROTÉGÉS, UN COURAGEUX RÉSISTANT KURDE, M’A-T-ELLE DIT, DONT J’AI APPRIS ENSUITE QU’IL ÉTAIT UN DANGEREUX TERRORISTE !" DANIELLE SOURIT À SON TOUR DE CET HOMMAGE EXASPÉRÉ À SA FOI MILITANTE.
Les combats de sa femme, son entêtement, sa naïveté parfois, ont souvent agacé François Mitterrand. Ses prises de positions abruptes, notamment son soutien inconditionnel à Fidel Castro ou au sous-commandant Marcos s’opposaient à la diplomatie française. A chacun de ses voyages à risques, les ambassadeurs étaient discrètement chargés de la surveiller, de corriger ses éventuels dérapages, de faire en sorte qu’elle ait le moins de contacts possibles avec la presse. Mais lorsqu’on attaquait Danielle, François la défendait toujours : "il ne supportait pas qu’on émette la moindre critique sur elle, en sa présence", se souvient son ami André Rousselet.
Au fond, que la première dame de France courre d’un continent à l’autre pour défendre les droits des Amérindiens, des Tibétains ou des Kurdes, qu’elle prenne fait et cause pour les guérilleros du Salvador ou les Zapatistes du Mexique l’amusait plutôt. Lui qui enrageait d’être contraint à l’orthodoxie financière par le FMI et les marchés, enviait la liberté et admirait le courage de Danielle.
Lorsque cette fille d’instituteurs militants socialistes et laïcs, résistants de la première heure fait la connaissance de Mitterrand au printemps 1944, il est recherché par la Gestapo et s’appelle Morland. Ils se marieront quelques mois plus tard et formeront un couple atypique. Un demi-siècle de vie commune qu’elle avait récemment résumé ainsi : "Nous étions mariés, nous avions des enfants et, à un moment, nos vies affectives ont bifurqué. Mais cela ne nous a pas empêchés de rester des amis très proches l’un de l’autre." L’existence d’Anne Pingeot et de Mazarine que les Français découvriront très tard, elle l’a connue très tôt. Elle a accepté de partager François. "C’est sa vie privée", disait-elle. Elle est restée la femme officielle, celle qui a vécu à son côté les heures noires où tout paraissait perdu et les heures de gloire. Le 10 mai 1981, c’est elle qui entonne l’Internationale dans la voiture qui les ramène de Château-Chinon à Paris.
Quand François Mitterrand accède à l’Elysée, elle refuse d’être "une potiche". Elle crée l’Association du 21 juin pour défendre les droits de l’homme et celui des peuples à s’autodéterminer. Plus à gauche, plus intransigeante que son mari, elle désapprouve le tournant de la rigueur de 1983 et le recul sur l’école. Pour ne pas le gêner, elle concentre son action sur le reste du monde.
Après la mort de François, elle devient, l’une des figures de l’altermondialisme, participe à tous les forums. Plus elle avance en âge, plus elle se radicalise, plus elle déconcerte. Même ses collaborateurs de France-libertés ont parfois du mal à la suivre. Elle reproche à plusieurs d’entre eux dont elle se sépare de "faire trop de droit". A ceux qui ne comprennent pas que l’on lutte pour les droits de l’homme sans invoquer le droit, elle répond : "notre rôle, c’est de changer le monde". Elle continue de croire à la victoire du socialisme mondial. La sauvegarde de l’eau "préalable à toutes les démarches pour défendre les droits de l’homme", disait-elle, fut sa dernière grande croisade.
Lorsqu’elle n’était pas au bout du monde, Danielle, entourée de ses petits-enfants, aimait regarder les vieilles photos de famille. Une notamment où François et elle se regardaient avec une grande tendresse. "Les gens peuvent dire ce qu’ils veulent, ce regard-là, c’est toute ma vie". Cette photo-là, en dépit de tout, résumait à ses yeux cinquante ans de complicité.
Robert Schneider, conseiller auprès de la direction de la rédaction du "Nouvel Observateur", a longuement côtoyé le couple Mitterrand.
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